Au regard de toutes ces particularités et du peu d’informations sur le sujet, cette région m’intriguait au plus haut point. L’accès par les pistes étant incertain en cette période d’après mousson, nous décidons d’un itinéraire pédestre au départ de Darbang, chef lieu du district de Myagdi. Il ne nous faudra pas plus de 6 jours pour couvrir les 90 km qui nous sépare de notre but via le col du Jaljala, ensuite nous devrons suivre le cours de la rivière Uttar Ganga, traverser la grande plaine de Dhorpatan puis s’enfoncer dans les gorges jusqu’aux premiers villages MAGARS de Uppalo et Taka Sera puis Lukum situé à une vingtaine de km plus au sud. Dés notre arrivée à Taka, nous rencontrons Ram Prasad , un ancien militaire à la retraite qui nous questionne sur les raisons de notre venue ici. Nous lui faisons part de notre intérêt pour le Chamanisme et il nous propose de rencontrer le doyen des Chamanes du village ; le vieux Lakshim Garti. Nous suivons Ram dans les étroites ruelles du village jusqu'à la demeure du Jhakri. Ram et Garti échangent quelques mots à notre sujet, nous faisons rapidement connaissance tout en buvant un thé et une cérémonie est fixée pour le lendemain soir lors de la pleine lune de Kartik Purnima. Katga Bura, élève de Lakshim pratiquera les rites qui durerons plus de cinq heures. L’année suivante, nous reviendrons à Taka pour une autre cérémonie de guérison avec Man Prasad Bura Magar. Ce dernier fit la démonstration de son charisme, d’une incroyable énergie et capacité à combattre les esprits malveillants et les forces surnaturelles avec son tambour jusqu'à l’épuisement. Il fait sans doute partie de la dernière génération de Chamanes à perpétuer cette tradition ancestrale dans toute son authenticité. Nous quittons Taka Sera le lendemain matin en direction de Lukum , autre village Magar d’une vallée adjacente, connu pour une forte activité Chamanique. A peine arrivée, nous entendons le son des Tambours en provenance d’une maison à l’entrée du Village. Une bonne dizaine de Chamanes Hommes et Femmes sont réunis sur une terrasse, ils semblent pratiquer un rituel à l’intention d’un enfant avec des chants et des danses. Ces deux incursions en pays MAGAR nous on permis d’assister à des rituels complexes, parfois difficiles à décrypter, d’y observer l’utilisation in situ des objets et surtout de rencontrer à l’aube du troisième millénaire des hommes extraordinaires, médiateurs entre le monde des humains et les forces invisibles de l’univers.